Dynamo Danse ! Grand Palais
Une heure de déambulation aléatoire, de François Morellet, Julio Le Parc, Carlos Cruz Diez à James Turell ! Interventions impromptues de 3 danseurs, en regard d’œuvres choisies, au gré du cheminement de l’exposition.
Les visiteurs ont été invités à intensifier, à décaler leur regard et à ressentir plus consciemment la musicalité des perspectives. Et chacun d’oser à son tour un mouvement, gestes spontanés qui veulent se dire… Cf. nos interventions participatives In Senso
Intervention au Grand Palais – Juin 2013
Extrait du rapport d’Isabelle du Rivau, pour la Cellule études et marketing de la RmnGP.
Dans l’expo, les danseurs arrivent. Au nombre de trois, ils se mêlent à la foule comme de simples visiteurs et, à part le fait qu’ils glissent leurs chaussures sous la chaise d’un gardien et commencent pieds nus une improvisation au début à peine perceptible, rien ne les annonce.
– Une danseuse arpente l’espace devant l’installation de Dan Flavin dans un sens puis dans l’autre à plusieurs reprises. Un tout petit enfant la suit du regard interloqué par ce mouvement répétitif. Elle le regarde et c’est alors qu’elle commence à se contorsionner entre les néons verts, suivie par un autre danseur. Le gamin est au premier rang du spectacle, la foule au fond de la salle, le silence est d’or.
– Un père à ses enfants, goguenard : « Vous voyez une danseuse vous ? Mais non, c’est une fausse, c’est une illusion d’optique ! »
– Derrière la paroi opaque de Light Gitter, une danseuse commence à évoluer en ombre chinoise. Un enfant tient la main de son père et tente de s’approcher tout contre la paroi, fasciné. Elle lui fait soudain un grand sourire et le gamin se tourne vers son père lui adressant aussi un large sourire, en échange.
– Quand les danseurs se mettent à improviser, le temps est suspendu. C’est presque magique ce calme tout d’un coup qui donnent aux œuvres une nouvelle envergure.
– Devant un tableau de Le Parc avec des cercles de couleur concentriques une danseuse s’approche, se recule, s’approche à nouveau et le public, petits et grands, répète le même mouvement, reprend la chorégraphie éphémère. Il paraît évident que les visiteurs ainsi sollicités auront eu un rapport plus direct à l’œuvre en question …
– Le public qui n’est pas au courant de cet événement commence à se rendre compte qu’il se passe quand même quelque chose de spécial ; certains vont de salle en salle à la recherche des danseurs qui se fondent dans le public. L’un d’eux regarde une œuvre en passant comme pour s’en inspirer ; trois jeunes attendent que « le show démarre » mais le danseur continue à regarder l’œuvre ; alors les trois jeunes la regardent aussi, ou par mimétisme ou se questionnant peut-être : « est-ce l’œuvre ou le danseur qui crée le mouvement ? »
– Ah, il se passe quelque chose dans les salles Chromosaturation de Carlos Cruz Diez ! Normalement le visiteur curieux n’hésite pas à rester planté en plein milieu pour se rendre compté des effets lumineux, alors que d’autres les fuient, perturbés. Là, tout le monde attend… Comme personne ne bouge, une femme (l’accompagnatrice des danseurs) m’invite « n’hésitez pas à rentrer dans l’œuvre… » ; 2 gamins qui ont déjà repéré la danseuse esquissent d’où ils se trouvent de petits pas de danse… Grand calme… La danseuse se met alors à tambouriner contre les parois ; un gardien se précipite depuis la salle voisine, l’air inquiet, pour voir ce qui se passe.
Le danseur prend alors la main d’un enfant : « Rentrez dans la couleur, on s’étire au soleil ce n’est pas que pour les enfants ! »… Une femme s’étire sans bouger de sa place puis une autre, plus extravertie, s’avance, laisse tomber son pull et commence à s’éclater…
– Ce qui est vraiment intéressant dans la prestation subtile des danseurs c’est qu’ils mettent en valeur les œuvres et l’exposition elle-même, du fait même qu’ils créent une ambiance particulière dans l’espace de l’exposition.
Ils offrent aux visiteurs une possibilité d’apprécier ce qui est là en aiguisant leur regard sur un focus inattendu ; leurs sens étant sollicités, cela les aide à rentrer dans les œuvres, à lâcher prise ou à s’interroger sur cet environnement sans passer par des mots. La possibilité d’interaction avec le public qu’offrent les œuvres est décuplée par cette mise en espace : les œuvres servent de support à une chorégraphie ou déambulation sensible, le public « rentre dans la danse » par le biais du geste, moyen d’expression peut-être plus directe qu’un discours, même si celui-ci incite à la participation de chacun
Dans les salles livrées au public, sans danseur, le brouhaha devient presque agaçant.
Une création Ars Anima avec Magali B, Isabelle David et Matteo Guillin.